Le temps d’un weekend à Douma

Nous avons décidé de monter – comme on dit au Liban – à Douma, village natal de mon père. Il s’agit en quelque sorte d’une tournée d’inspection afin de régler des problèmes de voisinage et de procéder à des travaux de maintenance. Cali ayant décidé hier soir de nous offrir une nuit blanche, nous nous sommes attardé avant de ne quitter que vers les 16 heures.
Nous sommes arrivés vers 18h30 seulement, profitant déjà d’une halte au terrain de Snaoubar, aux oliviers bicentenaires et à proximité duquel, la municipalité a procédé à des travaux dont les déblaiements ont été versés chez nous. Au coté des oliviers, nos figuiers portent haut les couleurs de leurs fruits, verts pour certains, rosés pour d’autres, noirs enfin, chacun possédant un goût propre , sucré pour certains, amer pour d’autres.

Arrivés à la maison familiale, située à la place principale du village, il s’agit d’une vielle maison dont le terrain lui-même appartient à la famille depuis plus de 200 ans désormais, elle respire l’Histoire de mon grand-père, un Homme comme on n’en fait plus.

Orphelin à son jeune âge – 6 ans plus précisément, séparé de sa grande soeur par ses oncles – , ses parents étant décédés lors de la Grande Guerre, famine imposée par l’Empire Ottoman de l’époque, il s’était juré de reconstituer le patrimoine de son père. Il n’a pas eu l’occasion d’aller à l’école mais a appris à lire par lui-même. Il n’hésitait pas à mettre lui-même la main à la pâte, rouvrant la boutique, seul vestige de l’héritage, le reste ayant été accaparé par ses tuteurs, n’hésitant pas, ses 13 ans venus à aller seul à Damas, négocier l’obtention d’un monopole de vente de Tabac auprès des autorités du mandat français. Il a ensuite racheté les biens de ses parents, les uns après les autres, ses oncles ayant décidé de quitter pour le Brésil, terrains, maison, seul le fait de payer les scolarités de ses enfants, l’a poussé à revendre certains biens. C’est ainsi qu’il a permis à mon père de faire ses classes de médecine en France, à mon oncle Rafic d’y faire son doctorat de Chimie, etc… La vie de mon grand-père a été émaillée des joies de la naissance de 5 enfants, et des regrets ou des chagrins, une fille décèdera à quelques mois à peine d’une insolation – la faute à sa nourrice qui l’a bêtement laissée sous le soleil de l’été tout un après midi, les épisodes de la guerre civile avec la destruction de ce pays qu’il aimait tant. Il a eu la chance de décéder en avril 2006, avant le conflit israélo-libanais d’alors.

Je ne peux pas oublier que je n’aimais pas Douma quand j’étais gamin, pire, je détestais m’y rendre. Ce n’est que dernièrement que j’ai appris à apprécier cette douce quiétude et ce calme matinal…